Le lien homme-animal est mis à rude épreuve dans notre société urbaine. Comprendre les multiples formes de l’intelligence animale est une première prise de conscience pour restaurer notre lien avec le vivant.
Selon Evelyne Heyer, biologiste et professeure en génétique des populations, nous avons 35 % de nos gènes codants en commun avec une jonquille, 70 % avec l’oursin et 98 % avec le chimpanzé ! Précisons que les gènes codants représentent un peu moins de 5 % de notre ADN. Néanmoins, ces chiffres replacent l’Homme dans une branche du vivant parmi des millions d’autres.
Les animaux ressentent des émotions
Le chien-loup est la première espèce domestiquée par l’Homme au temps des chasseurs-cueilleurs, pour la chasse et la garde des campements. Depuis, les liens fonctionnels originels ont évolué aussi en liens affectifs. Le 16 février 2015, la loi française a enfin reconnu que « les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité ». Reconnaître leur sensibilité, c’est admettre qu’ils ressentent des émotions. L’émotion est une réaction affective intense et fugace qui se produit sous l’influence d’un événement extérieur. Elle est au cœur de tout être vivant et au centre de toute relation, sans pour autant que nous soyons égaux face à son expression externe. L’émotion est utile pour s’adapter aux conditions environnementales et pour communiquer. Elle est inséparable des réactions métaboliques et des états physiologiques de l’organisme.
La neurobiologie nous permet aujourd’hui de mettre en évidence que les animaux subissent les mêmes réactions chimiques et libèrent les mêmes hormones que nous, humains, lorsqu’ils ressentent une émotion.
L’empathie chez les animaux
Pour Frans de Waal, primatologue et éthologue, l’empathie est « la sensibilité aux émotions de l’autre ou le souci du bien-être d’autrui, même lorsque cet autre n’appartient pas à la même espèce que soi ». Nous pouvons tous rapporter des exemples concrets avec nos compagnons familiers lors de maladies ou de séparations dans notre foyer.
Les célèbres récits des rituels chez les éléphants endeuillés ou les allaitements de sauvetage interespèces montrent qu’il en est de même avec les animaux sauvages. La coopération et la solidarité appartiennent aussi au règne animal.
Perroquet, dauphin, pieuvre… Les multiples intelligences animales
Les capacités cognitives des animaux sont remarquables mais aussi plurielles. Les perroquets peuvent tenir une conversation structurée et communiquer avec plus de 800 mots. Les dauphins ont le quotient encéphalique le plus élevé, presque similaire à celui de l’Homme. La pieuvre est l’animal invertébré le plus intelligent avec ses 9 cerveaux et ses 500 millions de neurones.
Quant aux grands singes, les travaux d’observation de Jane Goodall dans les années 1960 ont démontré qu’ils manifestaient des tempéraments et des réactions propres à chaque individu et bien différents selon les groupes au sein d’une même espèce, qu’ils utilisaient des outils et qu’ils avaient une grande capacité d’adaptation. D’ailleurs, les récentes études sur la flexibilité cognitive des singes montrent qu’ils apparaissent bien plus enclins que nous à explorer des solutions différentes de celles qu’ils connaissent pour résoudre un problème.
Les animaux reconnaissent leur corps
Les dauphins, les orques, les grands singes, les éléphants et les cochons ont réussi le « test du miroir », qui est un moyen en éthologie cognitive d’estimer la reconnaissance de soi et de son corps. Au bout de quelques jours, ils utilisaient même le miroir comme outil d’exploration approfondi de différentes parties de leur corps. Et connaissez-vous l’histoire de Washoe, femelle chimpanzé, ou de Koko, femelle gorille, qui ont appris la langue des signes lorsqu’elles étaient bébés et ont ainsi communiqué jusqu’à la fin en signant avec les humains et en transmettant ce langage à leurs petits adoptés ?
Quand l’animal soigne l’humain
L’équithérapie, ou thérapie avec les chevaux, est un accompagnement psychocorporel basé sur la présence du cheval comme médiateur et partenaire thérapeutique. Le cheval devient alors un miroir pour le patient et l’aide dans la gestion de ses émotions.
Ce soin est largement développé auprès des enfants autistes ou des personnes présentant des troubles anxieux ou comportementaux. La présence d’un animal apporte réconfort et confiance en soi, et le caresser permet de baisser le niveau de cortisol, l’hormone liée au stress, et de favoriser le sommeil.
Durant les périodes de confinement, les animaux de compagnie ont amélioré la santé mentale de leurs propriétaires, principalement lorsqu’ils souffraient d’isolement ou de dépression.
La conscience animale
En cinquante ans, 50 % des animaux sauvages ont disparu et plus de 1 000 milliards d’animaux sont tués chaque année dans le monde, principalement dans l’élevage intensif. Cela laisse à réfléchir.
Le 7 juillet 2012, lors de la déclaration de Cambridge sur la conscience des animaux, un groupe d’éminents chercheurs en neurosciences a affirmé que « les humains ne sont pas les seuls à posséder les substrats neurologiques qui produisent la conscience ». Enfin, comme le dit Matthieu Ricard dans son livre Plaidoyer pour les animaux, « nous vivons dans un monde essentiellement interdépendant, où le sort de chaque être, quel qu’il soit, est intimement lié à celui des autres ».
Le moment est peut-être venu pour l’Homme de s’inspirer de l’intelligence collective animale et de se souvenir de sa place au sein des différents règnes du vivant.
Le livre de Gaëlle Bertruc
Prendre soin de son animal avec les fleurs de Bach.
éditions Eyrolles
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